Projet 52²

[29] Anna – La houle

Pour la reprise de notre défi d’écriture, Sabine nous propose le thème de la voile et de la navigation. Alors, c’est parti, attention ça tangue fort dans les lignes qui suivent !

PICT1670 - copie

 

Ça tangue ! Mais qui a viré de bord sans annoncer la manœuvre ?
Bon sang, j’ai le cœur qui tourne à cause de cette houle qui me renvoie à bâbord avant de me jeter à tribord. Cette mer qui s’agite sous mes pieds dans la profondeur de la nuit, je sens presque ses embruns sur mon visage rougi par le vent force 4.
Je me tiens au bastingage pour ne pas passer par-dessus bord tellement tout bascule à chaque nouvelle vague. J’ai beau avoir le pied marin, je m’incline face à la force de la nature et cette tempête qui n’en finit pas de me bousculer tout au bout de la dunette. Je parviens, non sans mal à me réfugier à l’intérieur et arpente les coursives jusqu’à parvenir au carré des officiers. Je m’affale sur un banc fixé au sol et agrippe la table.

Ça tangue de plus en plus.
Je regarde autour de moi, le quartier-maître pas loin reste digne au cœur de cette tempête. Il devient mon point de mire, mon phare dans cette nuit obscure. Quand nos regards se croisent, je tente un vague sourire mais il se détourne aussitôt.

Je m’accroche alors de toutes mes forces à cette table et tente de récupérer mes sens. Rien à faire, j’ai l’impression que l’on va chavirer d’un moment à l’autre, que nous n’aurions jamais dû quitter le port et larguer les amarres. Un haut le cœur remonte le long de mon œsophage.

Il faut que j’atteigne ma cabine pour m’allonger. Mais impossible de garder le cap et de m’orienter dans ces maudites coursives. Pire, chaque hublot me balance quelque lame affrontant le bateau, comme si ce sacré gros cul était perdu d’avance et qu’il allait couler. Le gîte me balance d’un côté à l’autre du bâtiment, je finis pourtant par me repérer et retrouver le cap. Au lieu de m’affaler sur ma couchette, je me retrouve de nouveau sur le pont, le grain est encore plus violent, je tangue au rythme des vagues qui passent par-dessus le bastingage. Je m’accroche comme je peux au mât, l’embrassant avec mes deux bras.

Je sens tout à coup le mât se déplacer, une corne de brume résonne jusqu’au plus profond de mon corps, explosant mes tympans. Je tombe à la mer. Je me noie.

****


Le Croisic.
Tard dans la soirée, un officier de frégate, baraqué, qui buvait tranquillement au bar un demi a attrapé par le col un marin (habits d’apparat et pompon inclus!) qui l’enlaçait et lui a crié dessus avec une voix de ténor tout en le soulevant de terre, l’emportant à l’extérieur du bar pour le balancer sans ménagement dans la fontaine du port.

 

À propos de Anna

maman, blogueuse, auteur et un peu plus aussi ;) vous pouvez me lire sur : www.bdencre.com www.annasambook.com/ et mon premier blog (qui n'est plus actif) : caissierenofutur.over-blog.com

6 commentaires sur “[29] Anna – La houle

  1. ginou
    7 septembre 2015

    MDR !!! je repense à certains tangages sur la terre ferme …..

    Aimé par 1 personne

  2. GARREAU
    7 septembre 2015

    Excellente reprise ! Très bonne chute ! J’aime beaucoup « je tente un … vague sourire » … (c’est le bon qualificatif)

    Aimé par 1 personne

  3. Marjorie
    7 septembre 2015

    le Force 4 c’est redoutable 😉

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire

Information

Cette entrée a été publiée le 7 septembre 2015 par dans Anna Sam, Émotion, Drame, familial, Nouvelles, et est taguée , , , .